08

Forêt de l’empyrée, 17 décembre 11h00

«  - J’en déduis que tu m’a pardonné. Je croyais que tu m’en voulais ?
-
Je croyais que tu t’étais servi de moi. 
-
J’ai essayé de te manipuler. Je suis désolé mais c’était ma mission et si c’était à faire je le referais.
-         C’est pour ça que tu m’as embrassé l’autre jour.
-
Non, j’étais sincère, je le suis encore. »

Elle lui faisait confiance. Charles Smala l’embrassait parce qu’il en avait envie et non dans l’intention de la convaincre de faire quoi que ce soit.
Le vent s’était levé et, à l’altitude où ils se trouvaient le froid les saisissaient.

« On va attraper froid. Rentrons. »

Trop émue pour parler Jade le suivit en silence.

« - On ne peut pas faire ça !
-
Quoi ? »

La voix enrouée par l’émotion Jade tentait de comprendre ce que Charles venait de dire. Une seule chose lui venait à l’esprit : il ne fallait pas qu’il cesse de l’embrasser, de la serrer dans ses bras. Elle avait besoin de se sentir protéger, blottie contre lui.

« Je suis désolé Jade. Je dois te protéger et ce n’est pas comme ça que j’en serais capable. »

Anéantie la jeune femme le regardait d’un air implorant.

«  - Pourquoi ?
-
Où cela va-t-il nous mener Jade ? »

Elle sourit. La façon dont ce baiser aller se finir s’il ne l’avait pas interrompu était évidente.

« Je suis sérieux. Nous ne savons rien l’un de l’autre. »

«  Tu es honnête, courageux, capable d’éviter les balles et de voler dans les airs. Je suis maladivement timide, sauf avec toi étrangement, hyper maniaque et folle amoureuse de toi. Qu’avons-nous besoin de savoir d’autre ? »

Elle lui avait qu’elle  l’aimait ! Il n’avait pas rêvé.
Il ne se souvenait pas avoir jamais été aussi heureux. Ni d’avoir jamais eu aussi peur.
Ces sentiments pouvaient les emmener loin. Trop loin.
Elle était en danger. De mort.

« - Quelqu’un veut te tuer. Et tant que cette, ou ces, personnes ne seront pas derrière les barreaux nous laisseront cette conversation où elle en était.
-
Et si je ne suis pas d’accord ?
-
Jade. Sérieusement, que ce passerait-il si ces bandits nous attaquaient et que je ne puisse rien faire, trop distrait par…. »

La jeune femme sourit. Il avait raison mais elle tremblait de frustration.
Il était là, debout devant elle, le seul être capable de lui faire vivre cette grande histoire d’amour dont elle rêvait depuis l’enfance. Et savoir qu’il leur faudrait attendre la rendait furieuse.
Il avait l’air suffisamment mal à l’aise. Elle choisit de le rassurer.

« Tu as raison. Mais un jour il faudra finir ce baiser Charles Smala ! »

Commissariat central 17 décembre, 11h00

«  - Aller mon vieux, soit sympa. Dis moi où ils se cachent.
- Certainement pas.
-
Ecoute le Maire me harcèle toutes les dix minutes pour avoir du neuf dans cette affaire, et je ne me vois pas lui annoncer que mon unique témoin à charge s’est fait la belle avec l’un de mes hommes.
- Et lui annoncer qu’ils sont morts tous les deux parce qu’il est pourri jusqu’au trognon, tu t’en sens capable ? »

Le commissaire s’offusqua dans un hoquet. Mais peu importait à Yseph, il était furieux.

«  - Tu penses que la fuite vient de lui ?
- Ca fait plus de trente ans que je traîne avec des flics ou des militaires et je ne pense pas qu’un de tes hommes, que l’un des amis de mon fils, soit capable de jouer les indics pour les méchants.
-
Tout de même. C’est le Maire ! Qu’est ce que cela lui apporterait de les faire tuer ?
- Tu m’as dit toi-même qu’il était le seul au courant pour la planque. Tu l’avertis et moins de deux heures plus tard ; PAF, la jolie Jade et mon fils jouent les quilles dans un bowling à la voiture.
-
Tu le vois réellement en  fonctionnaire corrompu ?»

Le maire était ambitieux, arriviste et près à tout pour laisser son nom dans l’histoire.
C’est pour cela que ça ne collait pas.
Cette affaire de corruption ne pouvait rien lui apporter de bon, surtout à quelques semaines des élections.

«  Je ne crois pas que ce soit lui en effet. Mais c’est forcément un proche. Un collaborateur, un parent, un ami, tu as enquêté sur tout le monde. »

Le commissaire eut un rire ironique

« - Bien sûr Yseph ! Toute la ville est sous surveillance ! Tu plaisantes j’espère, comment veux tu que je fasses ça? Notre budget semble Peau de Chagrin et nous avons dû nous séparer de la moitié de nos effectifs ! Désolé mais tu me demandes l’impossible. Notre seule chance c’est de les surprendre en flag.
- A quelle heure à lieu le « rendez-vous » ?
-
J’ai trois hommes sur place depuis plus d’une heure. Ils m’appelleront à la moindre info. Pour l’instant on ne peut qu’attendre. Tu es sûr qu’ils sont en sécurité ?
- Absolument. N’ai pas peur, Charles est tout à fait capable de les protéger.
-
Je n’en ai jamais douté. C’est mon meilleur homme. Tu peux être fier de lui.
- Je le suis mon vieux. Je le suis »

A cet instant la porte s’ouvrit dans un fracas et Brigitte Gastronome fit une entrée des plus théâtrale.

«  Yseph Smala tu vas avoir de gros pépins ! »

Sans laisser une chance à son mari de répondre elle se lança dans un sermon digne d’un jour de Pâques.

« J’apprends qu’il a corruption au cœur même de l’administration, infiltration, tentative de meurtre, témoin protégé, surveillance de la police ! Ca sent le scoop et tu ne m’as rien dit ! Heureusement que j’ai des amis, des VRAIS qui me tiennent informés ! »

Le commissaire éclata d’un rire sincère et souhaitant « bonne chance » du regard à son vieil ami Yseph Smala il s’éclipsa, préférant les laisser régler seuls ce différend.

Il avait beau les connaître depuis de nombreuses années la passion qui animait Yseph et Brigitte Smala l’étonnerait toujours.



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